Cette épidémie qui frappe les médecins…  

Chère lectrice, cher lecteur,

Un jour que j’étais petit, je dis à ma grand-mère, qui vivait tout proche de mon école : « Mamie, j’ai mal à la tête ! Je ne peux pas aller en cours ! »

Et ma grand-mère de m’interroger : « Aurais-tu une flemmingite aiguë ? »

Et moi de répondre tout innocemment : « Ça doit être ça…

  • Donc, tu iras à l’école ! »

Je m’étais bien fait piéger ! J’avais juré que l’on ne m’y reprendrait plus… Mais je ne pensais pas que je devrais un jour subir la flemme aiguë des autres !

Car ces derniers temps, j’ai eu quelques mauvaises expériences avec les médecins. J’ai donc commencé à poser quelques questions autour de moi, chaque fois qu’un de mes proches me confiait avoir un rendez-vous.

Vraisemblablement, chez ces professionnels, la flemmingite bat son plein ! Car même s’ils sont là, fidèles au poste, nombre d’entre eux sont désormais partisans du moindre effort…

Les témoignages sont accablants : vous attendez en moyenne 3 mois pour avoir un rendez-vous avec un spécialiste, au demeurant fort sympathique, mais dont les prestations sont presque toujours incomplètes.

On me rétorque : « C’est partout comme ça depuis le Covid, M. Volta… Plus personne ne fait le boulot correctement, tout va à veau l’eau. »

D’accord, d’accord… mais mon médecin, ce n’est pas mon coiffeur ! Je place ma santé entre ses mains, tout de même ! Je ne suis pas le seul d’ailleurs…

S’il y a quelqu’un dont je dois vous raconter les tribulations, c’est bien mon amie Emma, qui les collectionne (comme tant d’autres…).

Les médecins traitants, tout un roman…

Emma s’est installée dans le quartier où elle vit il y a 20 ans. Alors fraîchement diplômée et insouciante, elle avait choisi comme médecin celui qui était le plus proche de chez elle, Hugues.

C’était un médecin d’une petite cinquantaine d’années, affairé mais attentif. Il n’y avait pas plus sympathique que lui, mais…

Quand vous l’appeliez, il ne prenait que sans rendez-vous, et l’après-midi, ce qui pouvait impliquer de devoir bloquer une demi-journée.

En effet, si vous aviez le malheur d’arriver après 17h, c’était en moyenne 2 heures d’attente au milieu des habitués qui avaient fait la queue une demi-heure avant l’ouverture du cabinet, à 14h !

Une fois où notre chère Emma n’en pouvait plus en rentrant du travail, à 18h30, elle ne sortit pas du cabinet avant 22h… et avec un mauvais diagnostic !

Hugues lui avait prescrit de quoi soigner une cystite, alors qu’elle avait en fait une mycose ! Résultat : Emma a passé tout le week-end à prendre des antalgiques et à se tenir l’entrecuisse, en attendant d’obtenir un autre diagnostic.

Elle en a gardé un souvenir cuisant.

Mais le pompon, ce fut le jour où elle surprit Hugues à 23h en train de dissimuler le haschisch des revendeurs du quartier. Alors là, elle s’était jurée : « Non, non, non !… Plus jamais ! »

Conseils d’un médecin obèse

Sur les conseils d’une camarade d’association, elle se rendit un peu plus loin, chez Sylvain. Tout le contraire de Hugues.

Là où Hugues était svelte et nerveux, Sylvain, flegmatique, frôlait l’obésité. Il faisait même plus que la frôler, d’ailleurs… Il n’était pas vraiment un exemple en matière d’hygiène de vie.

D’ailleurs, pendant la pandémie, il avait insisté en vain pour qu’elle se fît « vacciner ». « C’est du sérieux, j’ai fini à l’hôpital ! » lui avait-il lancé. Poliment, elle s’était tue. Si seulement il maigrissait un peu…

Au moins, Sylvain prend ses patients sur rendez-vous, avec jamais plus d’un quart d’heure d’attente. Normal : il expédie chaque consultation en 10 minutes, chrono en main !

Et quand la consultation dure douze minutes, il commence à soupirer…

Autre grande qualité : jamais vous ne le prenez en défaut de mauvais diagnostic !

Au moindre cas un peu complexe, il vous envoie faire des batteries d’examen. Avec lui, les laboratoires d’analyse ne risquent pas de péricliter !

Mais Emma avait quelques problèmes de grains de beauté. Elle demanda donc à Sylvain s’il ne pouvait pas lui recommander un dermato. Elle s’attendait à ce que son médecin traitant lui adresse quelqu’un de confiance.

Que nenni ! Sylvain s’empressa de regarder sur Google ! Avant de lui recommander le dermatologue le plus proche.

Heureusement, parce qu’autrement, Emma aurait regretté le voyage.

Chez la « dermato du coin »

Emma vit en banlieue, et dans une de ces banlieues proches d’un centre-ville où les loyers ne cessent de grimper. Elle se dit donc qu’elle pouvait aller les yeux fermés chez un spécialiste local.

Après tout, se dit-elle, ils prennent un surcroît d’honoraires, ils devraient donc être plus fiables que les généralistes… Elle rentre, et n’attend pas trop longtemps.

La salle d’attente comme le cabinet lui-même sont pour le moins vétustes, et la peinture des murs est jaunie par les décennies… ou par la cigarette. L’éclairage froid des néons blancs n’arrange rien à l’aspect crépusculaire du lieu.

La dermato, de nature, n’est pas très sympathique… et elle ne force pas beaucoup sa nature.

Emma n’exige pas d’être reçue comme dans un palace… mais tout de même, quand on s’apprête à « lâcher » 70 € pour une consultation, même avec les remboursements, ça fait des sous !

Pour ce prix-là, elle devrait avoir le droit à un sourire…

3 fois sinon rien !

Emma se rendra trois fois chez la spécialiste.

Une fois pour le diagnostic – elle doit insister lourdement pour se faire enlever un grain de beauté qu’elle estime suspect, contre l’avis de la praticienne. Une autre fois pour l’ablation elle-même, et une troisième fois pour le suivi.

Il va de soi que chez presque tous les spécialistes, vous ne pouvez pas vous soustraire à un minimum de trois visites !

Pourtant, Emma aurait pu prendre un petit coup de bistouri rapide dès la première visite et recevoir les résultats dans une jolie enveloppe une semaine plus tard. Pour un mauvais grain de beauté, faut-il tergiverser des semaines ?

Mais non ! En-dessous de trois visites, le spécialiste se sent floué !

Il n’apprécie guère que vous vouliez avoir accès à une médecine efficace et rapide. Il est moins là pour soigner que pour recevoir… et prendre des sous à chaque fois que vous passez sa porte !  

Au moins la « dermato du coin » a-t-elle fait le travail correctement, et l’ablation s’est bien passée. Lors de la visite de suivi, contente d’elle, elle va même jusqu’à faire une petite confidence à Emma :

« Vous aviez raison de l’enlever en fait. Il pouvait être cancéreux. »

Emma est sortie du cabinet les yeux écarquillés – jamais plus elle ne remettra les pieds ici !

Même le dermato de centre-ville…

Elle ne pouvait rien y faire, Emma, il lui poussait des grains de beauté, c’était comme ça. Elle a donc demandé à droite et à gauche, pour trouver un dermato sérieux.

Et là, pas le choix, il faut aller dans la grande ville. 90 € la consultation, 21 € remboursés par la Sécu, 9 € par la mutuelle… 60 € à sa charge. Quand vous avez 1000 € par mois pour les courses et les sorties, ça fait beaucoup d’argent.

Elle y va, et elle tombe sur un praticien hollandais, qui supplée aux absences de la dermatologue. Il est serviable, compétent, et elle se sent en confiance avec lui.

Elle lui laisse même lui enlever une excroissance de peau dans la face intérieure des cuisses. C’est la première fois qu’elle rencontre un praticien aussi professionnel.

Emma avait fini par croire que ça n’existait plus, et elle en était presque désespérée. Car la dermatologie, ce n’est pas comme les travaux, on ne peut pas s’en occuper soi-même.

Hélas, ce moment de confiance dans la médecine ne va pas durer, parce que le praticien a décidé de rentrer dans son plat pays natal. Mais au moins, le cabinet était propre et bien équipé. Elle décide donc d’y retourner…

Partisane du moindre effort

Emma se retrouve alors avec la propriétaire du cabinet. Douce, gentille au demeurant, mais qui, ayant déjà passé l’âge de la retraite, n’a plus envie d’en faire beaucoup…

Une autre excroissance de peau dans l’entrecuisse ? elle la lui brûle avec de l’azote, mais rien ne part, car le morceau est trop gros. Trois jours après, elle se retrouvera avec un petit bout de chair qui pendouille ! 

Des boutons qui reviennent sans arrêt sur les parties intimes ? Il faudra s’en occuper durant l’hiver, car la zone est trop humide…

Le prix ? Il est monté à 100 €, mais les remboursements plafonnent à 30 €. D’ici 6 mois, Emma aura eu le temps de mettre des sous de côté… ou de se trouver une autre dermato…

Sauf qu’Emma a beau appeler, aucun spécialiste, même en centre-ville, ne prend de nouveaux patients. Ils ont tous six mois de rendez-vous en avance, et ils ne prennent de rendez-vous que sur annulation…

« Rappelez la semaine prochaine, madame » entend-elle encore et encore…

La fabrique du médecin-bureaucrate

Emma est au désespoir, et elle n’est pas la seule. Où est passée cette France dans laquelle elle est née, qui était le phare de la médecine dans le monde ? Disparue, elle doit se rendre à l’évidence…

Elle voit bien que la plupart des médecins chez qui elle est allée consulter ne sont pas de mauvaise volonté, loin de là. Ils ont juste fini par se résigner.

Dans les campagnes, les jeunes praticiens ne veulent pas s’installer, parce qu’ils ne gagnent pas assez bien leur vie et les conditions de travail sont très dures.

Dans les villes, les loyers sont chers, le prix des consultations très bas, donc les médecins ont tendance, sans même y réfléchir, à récompenser les « bons clients », c’est-à-dire ceux qui reviennent régulièrement.

Un peu comme votre cafetier du coin ou le restaurant où vous allez toutes les semaines…

Lorsque vous êtes un patient ordinaire, qui a un problème ponctuel, ou mieux encore, qui veut prévenir ses problèmes de santé, le praticien s’en tient, là aussi sans même s’en rendre compte, au service minimum.

Ce n’est pas vraiment de la faute des médecins, mais la conséquence d’un système de santé tellement colonisé par la bureaucratie que le médecin lui-même est devenu fonctionnaire.

Combien de temps cela va tenir ?

Les praticiens sont moins nombreux, plus âgés, donc moins volontaires.

Malgré la levée du nombre limite d’étudiants en médecine à être diplômés chaque année (le numerus clausus), on ne se bouscule plus pour faire une carrière difficile et pas si bien payée.

Encore moins quand le gouvernement veut contraindre les diplômés à s’installer à la campagne, où ils ont peu de chances de s’égayer après de si longues études, et encore moins de trouver le partenaire d’une vie…

Beaucoup de jeunes diplômés partent donc à l’étranger, et beaucoup de médecins étrangers, qui constituaient une force d’appoint, se détournent de la France.

Les généralistes « enchaînent » les patients au détriment de leur propre santé. Les spécialistes, qui devraient pour beaucoup être en retraite, sont d’autant plus réticents à prodiguer certains soins qu’ils sont moins sûrs de leurs gestes.

Les statistiques de satisfaction se concentrant uniquement sur la médecine hospitalière, on ne peut que se plaindre du manque de médecins – les « déserts médicaux ». Mais qu’en est-il de la qualité de la médecine ?

Elle est la grande perdante d’un système de santé en déliquescence, que les pouvoirs publics ont laissé dépérir pour mieux le privatiser. Or la privatisation n’est pas non plus une garantie absolue de qualité.

Tout le système médical, le statut et la rémunération des médecins sont à repenser, ainsi que leur formation psychologique et leur indépendance vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques.

Mais pourquoi nos dirigeants voudraient-ils y remédier ? Ils travaillent pour les laboratoires pharmaceutiques et ils défendent les argentiers de la médecine privée.

Avec eux, seul fonctionne le rapport de force, comme à Carhaix, où Yannick Neuder, le nouveau ministre de la Santé, devait se déplacer pour calmer une situation hospitalière très tendue.

Il a naturellement réussi à reporter sine die sa visite… preuve du courage qui l’anime[1].      

Et vous, quels sont vos rapports avec les médecins ? Avez-vous rencontré les mêmes problèmes qu’Emma ? N’hésitez pas à nous faire part de vos témoignages en commentaire.

Portez-vous bien,

Louis Volta


Sources [1] https://www.letelegramme.fr/finistere/carhaix-29270/carhaix-la-visite-du-ministre-de-la-sante-prevue-lundi-5-mai-est-reportee-6810510.php – « Carhaix : la visite du ministre de la Santé, prévue lundi 5 mai, est reportée », in Le Télégramme, 3 mai 2025.

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