Chère lectrice, cher lecteur,
En cette période de grave crise économique, les champignons suscitent une convoitise considérable. Car ils se vendent bien.
Par exemple, les cèpes se vendent entre 15 et 20€ le kilo, et ce sont des centaines de kilos qui changent de main en une seule journée de marché, même dans des petits villages…
Au point que l’on se batte dans les bois !…
En effet, les forêts dans lesquelles les champignons sont cueillis sont généralement privées. Ou alors, les riverains qui ont vendu un bout de terrain à la commune ont pris l’habitude de garder leurs « coins à champis ».
Ils voient donc d’un mauvais œil arriver des dizaines de voitures agglutinées les unes aux autres sur les bords de la route. On échange des insultes, et pour un peu, on en viendrait aux mains…
Un permis pour les champis
Pour éviter cela, et à cause de la recrudescence des « incivilités », la commune de Caixon dans les Hautes-Pyrénées s’est vue contrainte d’imposer un permis de cueillir de 20€ réservé aux riverains.
Ceci à cause d’un automne particulièrement abondant, il y a une dizaines d’années, ou pas moins de 250 voitures s’étaient entassées dans les forêts de la commune.
Depuis, avec le permis, les riverains peuvent reprendre une cueillette plus tranquille, il y a moins de monde, et « seules une à deux infractions » sont jugées au tribunal local chaque année…
Parce que derrière une activité plutôt anodine, on voit un changement de société assez curieux…
Il vaut mieux cultiver son jardin
Tel que vous me voyez, je préfère amplement cultiver mes propres champignons… je vous en ai parlé dans une précédente lettre.
En général, je préfère ne pas me battre, surtout pour des petits êtres vivants qu’il est si simple de faire pousser chez soi…
Mais je ne suis pas dans une situation financière si épineuse que je doive compter sur cette cueillette pour arrondir mes fins de mois.
Cela me fait penser naturellement à ces famines médiévales où des familles entières allaient habiter dans la forêt (à leurs risques et périls) parce que l’agriculture ne leur donnaient plus de quoi subsister.
Bien sûr, nous n’en sommes pas là. Mais que l’on doive se rabattre sur la forêt et les lieux sauvages pour vivre correctement indique bien que notre situation collective n’est pas reluisante.
Par conséquent, faut-il souscrire à cela et acheter les « champignons de la discorde » ?
Quand vous parlez à des cueilleuses de plantes, elles sont persuadées que l’efficacité du remède dépend directement de la période mais aussi des conditions plus générales dans lesquelles les plantes médicinales sont cueillies.
Quand nous achetons des champignons pour lesquelles on se bat, est-ce qu’on n’endosse pas la zizanie qu’ils portent avec eux ? Et de façon moins symbolique, est-ce qu’on n’encourage pas cette zizanie ?
J’ai hâte de savoir ce que vous en pensez. Dites-le moi dans les commentaires, je serai ravi de lire vos réponses.
Les fous de la gastronomie
Un autre aspect de cette étrange querelle champignonière est l’importante demande qu’il y a pour des champignons un peu raffinés.
Cette demande n’est naturellement pas étrangère à la montée assez effarante des prix des champignons.
Cela me fait penser que je me suis promis de me faire une sauce au aux morilles il y a longtemps, mais que j’y renonce chaque fois que je vois le prix auxquelles elles sont vendues…
L’article de TF1 nous l’indique, mais nous le savions déjà : de plus en plus gens sont capables de payer de plus en plus cher pour manger des champignons plus haut-de-gamme que les champignons de Paris.
D’un côté, je ne peux que me réjouir que la culture culinaire en France soit plus vivace que jamais…
Mais de l’autre, je suis quelque peu étonné de voir que l’on vit dans une société qui développe des obsessions de consommation pour à peu près tout et n’importe quoi.
Obsessions qui ont déjà viré à la foire d’empoigne comme nous l’avons vu il y a quelques années avec « l’émeute Nutella ».
Que les Japonais soient fous de champignons parce qu’ils y voient une source inépuisable de jeunesse et de santé, cela s’explique par les qualités médicinales de leurs champignons – shiitake, reishi, cordyceps…
Mais que l’on en vienne à se battre dans nos forêts pour satisfaire aux surenchères de nos gourmets me paraît un peu triste pour une saison déjà ordinairement mélancolique.
Là aussi, j’ai hâte de connaître votre avis.
Au plaisir de vous lire,
Louis Volta