Chère lectrice, cher lecteur,
Alors que nous avons tout juste terminé de déménager, ma compagne et moi, il se trouve que dimanche dernier, je lui propose de faire une omelette.
Je prépare soigneusement tous les ingrédients à l’avance, parce que ça cuit vite, comme vous le savez…
Sauf qu’au moment de faire l’omelette proprement dite, je lui demande où se trouvent les spatules. Elle me répond, un peu gênée : « J’ai jeté tes vieilles spatules en bois, mon chéri, elles étaient vraiment dans un sale état ».
Je n’en disconviens pas : cela faisait des décennies que je les possédais, et on aurait dit qu’elles avaient été mordues par des ragondins ! Qui dit « nouvel appartement », dit « ustensiles neufs »…
Mais là, je me retrouvais démuni, sans rien à part une cuillère en métal qui, malgré son manche en plastique, ne me paraissait pas bien pratique… et à même de rayer ma poêle toute neuve…
« Comment je fais pour cuisiner, mon amour ? »
Et elle d’aller me chercher dans un carton de quoi faire notre omelette avec ses oignons bien caramélisés et ses morceaux de lard bien brûlants…
Avec quoi revient-elle ?
Avec une spatule noire…
Comme dans un film d’horreur, je croyais qu’une telle abomination avait disparu de la surface de la Terre.
Mais il faut croire que nous étions dans une de ces suites de films de série Z, où les derniers rejetons d’une entité immémoriale et hautement maléfique n’ont pas dit leur dernier mot.
« Je croyais qu’ils les avaient interdites » répondis-je, pâlissant.
- Mais pourquoi mon chéri ? c’est bien pratique ! Et puis c’est du plastique alimentaire, tu peux y aller…
C’est amusant ça, le mythe du « plastique alimentaire ». A la limite, ça tient pour le film plastique… mais pour les spatules noires…
Un ustensile plus néfaste que néfaste
En 2024, la revue Chemosphere a publié un papier sur les ustensiles de cuisine en plastique, et spécialement les ustensiles en plastique noir[1].
Je dois vous dire que j’ai toujours trouvé ces ustensiles de cuisine en plastique assez dangereux. En effet, ils chauffent et libèrent nécessairement des microplastiques dans votre poêle ou votre casserole…

Quand ce ne sont pas des petits morceaux entiers… Vous allez me dire que l’avantage avec la spatule noire, c’est qu’ils sont bien visibles !
Mais, sarcasme mis à part, les plastiques noirs sont encore plus dangereux, car il s’agit de plastiques recyclés, issus de l’industrie électronique. Or ces plastiques sont pleins de retardateurs de flamme bromés et organophosphorés.
Si le brome est un toxique connu pour faire baisser la libido, les organophosphorés, qui rentrent aussi dans la composition des pesticides modernes, sont de véritables poisons.
Même si l’exposition qu’implique de faire la cuisine avec une spatule noire ne vous donnera pas les mêmes convulsions et autres risques létaux que l’ingestion directe de pesticides, les risques à long terme sont considérables :
- Carcinogénèse : l’apparition de cancers
- Perturbation endocrinienne, donc embonpoint et baisse de la libido
- Neurotoxicité, avec les problèmes psychologiques, voire locomoteurs, que cela peut engendrer
- Toxicité reproductive
- Toxicité « développementale », c’est-à-dire pour la croissance des petits
Cela ne fait pas un peu beaucoup pour une petite spatule toute bête ?
Peut-on encore critiquer les spatules noires ?
Il se trouve que nos chercheurs avaient commis deux erreurs coup sur coup, qu’ils ont corrigées, quant à la dose toxique avalée quotidiennement par les usagers d’ustensiles de cuisine en plastique noir.
Quoique les chiffres qu’ils ont trouvés soient très au-dessous de ce qu’autorise la législation américaine – particulièrement laxiste en ce qui concerne la toxicité alimentaire – cela ne change pas leurs conclusions sur la dangerosité de ces instruments.
Mais cela a créé un précédent, et des délateurs se sont mis à passer au peigne fin cette revue spécialisée dans la consommation qu’est Chemosphere, conduisant à la rétractation d’une trentaine d’études et à l’arrêt de la recension de la revue par les moteurs de recherche.
Pourtant, la question ne se pose même pas…
Les microplastiques devraient être limités pour la cuisine au minimum, légalement parlant. Et les plastiques recyclés contenant des retardateurs de flamme, interdits purement et simplement.
Mais il faut croire que Chemosphere a aussi voulu mettre à profit le surcroît de réputation que lui a apporté cette étude, qui n’était déjà pas exempte d’exagération…
Et c’est bien dommage, car c’est ce genre de revue qui vous alerte sur la toxicité (croissante) de votre environnement, même s’il lui arrive de galéjer…
Évitez à tout prix les microplastiques dans la cuisine
Quoiqu’il arrive, les microplastiques sont des perturbateurs endocriniens pour beaucoup d’entre eux, ainsi que des cancérogènes, sauf à de rares exceptions, comme le PET des bouteilles.
Cela va de soi, préférez toujours les instruments en métal et en bois.

Pour les planches à découper par exemple, il ne faut jamais utiliser une planche en plastique, dont le caractère « hygiénique » consiste surtout à voir quand elle est sale…
Préférez le bois de bambou, dont les propriétés antibactériennes sont solidement établies – ce qui ne dispense pas de la nettoyer à chaque usage.
Si vous voulez quelque chose de plus précieux, vous pouvez opter pour l’hinoki, un cyprès japonais qui a des vertus identiques et une qualité esthétique encore très supérieure !
Pour les spatules, privilégiez le bois de hêtre, même si la plupart des bois durs conviennent, comme le chêne ou le teck. Autant j’aime les noix, autant je me méfie du noyer, qui est un arbre toxique.
J’ai une tendresse particulière pour l’olivier et sa générosité un peu grasse, qui lui donne une touche d’humanité en plus – à mon humble avis.
Et vous, dans quelle matière sont vos ustensiles ? Est-ce que vous avez des affinités particulières ? N’hésitez pas à m’en faire part dans les commentaires !
Au plaisir de vous lire,
Louis Volta