Cher ami, chère amie

Je voudrais remercier toutes celles et ceux qui m’ont honoré de commentaires[1] chaleureux à propos de ma dernière lettre de décembre 2022. Tous me touchent et me vont droit au cœur.

Ces commentaires soulèvent d’importantes questions auxquelles j’ai plaisir à répondre.

Je voudrais tout d’abord revenir sur un commentaire de Jacqueline, qui nous parle d’Acceptation, Bienveillance, Béatitude, et Transmission. Ces 4 mots ouvrent la porte à bien des sentiments qui me sont familiers.

Acceptation !

Ceux qui me lisent depuis longtemps savent que je suis passé plusieurs fois de l’autre côté du miroir, c’est-à-dire dans la posture du « patient », avec l’acceptation que cela implique d’avoir.

L’acceptation est l’une des postures les plus riches de la vie. Accepter, sans se plaindre, comme le souligne Madeleine du haut de ses 85 ans. Accepter la seule chose qui n’appartient qu’à nous : le film de notre vie avec ses plans larges, ses zooms, ses zones claires et celles plus obscures. S’accepter soi-même et les autres, sans regrets et encore moins de rancune. Cela ne doit pas être si facile car j’en connais qui, même à cet âge-là, continuent de regretter ou de culpabiliser… par exemple sur l’éducation de leurs enfants, leurs choix amoureux ou sociétaux.  

Comme le souligne Wayenece, nous sommes dans un monde de désarroi où le matérialisme, trop souvent aux commandes, prend le pas sur la morale et la religion. Je crois que c’est une facilité qui provient d’une époque révolue on l’on pouvait espérer que la science allait résoudre tous les problèmes, éteindre toutes les misères et éloigner définitivement le temps des guerres et des obscurantismes.

Nous savons maintenant qu’il n’en est rien.  Que l’on traite de la morale, de la philosophie, de la religion ou de l’esprit, peu importe, ces « au-delà » de la science peuvent nous conduire vers un commencement d’acceptation.

Bienveillance !

Avec les années, je réalise que la bienveillance pourrait être le centre et la finalité de notre vie. Si, avec le temps, nous ne devions réussir qu’une chose, je crois que ce serait la bienveillance, ainsi que l’ouverture à l’autre qui en découle. Elle est miraculeusement spontanée chez certains mais, le plus souvent, elle s’apprend, elle s’expérimente. C’est un lent et saisonnier travail, comme celui de la graine qui germe, un apprentissage qui provient d’expériences souvent opposées et toujours douloureuses. Combien je le ressens, moi qui sais ne pas toujours avoir été bienveillant, avec cette sensibilité et cette puérilité qu’exprime Sylvain dans son témoignage – auquel je reviendrai.

Béatitude !

Je pourrais aussi écrire sur le sourire, parfois lié à la méditation[2]. Ce sourire aux coins des lèvres des représentations du Bouddha, ce sourire « qui en dit long », ce sourire qui est l’expression de notre joie intime. Christian Bobin (que j’ai abondamment cité dans ma lettre de décembre) nous dit dans un podcast de France-Inter[3] du 2 octobre 2022 que je vous invite à écouter : « C’est quelque chose qui vient du dehors pour frapper à la porte du dedans, pour frapper au cœur directement. Vous n’en êtes pas le maître et ce n’est pas vous qui décidez de sa venue comme des choses réellement essentielles ».

Acceptation, bienveillance, béatitude et joies, absolument indissociables, contribuent à notre bonheur ultime, celui que je nous souhaite, quels que soient les soubresauts du monde. C’est le remède à toutes les angoisses et les peurs[4], que soulèvent dans leurs commentaires Sylvain, Slaheddine, Marie-Lau et Madeleine… et qui est une préoccupation pour tant d’entre nous.

La dernière de ces peurs n’est-elle pas la peur de mourir ? C’est cette peur que nous devrions apprivoiser, et ne pas confondre avec la peur légitime de souffrir. Celle-ci, heureusement, fait débat aujourd’hui dans le cadre des réflexions bioéthiques à propos de la fin de vie.

La transmission !

C’est la transmission de tout ce qui précède. Celle qui me motive à écrire ces lettres. Impossible, à ce jour, de savoir quel est le poids réel de cette transmission, mais c’est le chemin qui importe. Nous sommes informés que la médecine de demain – avec le développement des algorithmes et de l’intelligence artificielle – aura des possibilités que nous ne pouvons encore imaginer. Restera-t ‘ elle ou sera-t ’elle ressentie encore comme humaine, bienveillante et joyeuse ? C’est aux chercheurs d’en décider. Soyons vigilants et apprenons à nos enfants à l’être, car ce sont eux qui seront concernés.

J’aimerais maintenant revenir sur le commentaire de Sylvain avec ses questionnements ainsi que ses peurs.

Sylvain partage sa peur vis-à-vis du monde médical

La peur de l’acte chirurgical et/ou de la prise de médicaments est monnaie courante… une peur que le soignant apprend à apprivoiser, mais il lui faut souvent des années. Les jeunes confrères détenteurs d’un savoir tout neuf veulent en exprimer la puissance et tolèrent mal ces peurs. C’est tout à fait normal.

Je ne vous apprendrai pas que l’ensemble de notre système hospitalier est en crise. Ce n’est pas seulement une crise de moyens financiers et de salaires (qui existe bel et bien) mais plus encore une crise de reconnaissance, une crise de dignité et de valeurs qui conduit un nombre croissant de soignants de toutes catégories à abandonner le métier, à se reconvertir dans d’autres activités qui n’ont plus rien à voir avec le soin.

Cette crise (comme la crise de l’énergie) était prévisible… Depuis 2004, le principal mode de financement des hôpitaux publics et privés est la rémunération à l’acte technique, c’est ce que l’on appelle le T2A[5] : plus ces actes sont nombreux, plus l’hôpital gagne de l’argent. Ce mode de financement a contribué à l’épuisement et à la dévalorisation des soignants, par l’encouragement des cadences et à cause de la réalisation d’actes techniques non indispensables.

En janvier sur France Inter, André Grimaldi (un professeur émérite d’endocrinologie-diabétologie à la Pitié Salpêtrière, signataire d’une tribune aux côtés d’un millier de médecins) a déclaré[6] :

« On est au bout d’un système (…) Imaginez une grande surface à qui l’on dit ‘il faut vendre de plus en plus mais plus vous vendez et plus on baisse les prix« .

Et par d’autres biais qu’il serait difficile de détailler, ce système s’est élargi jusqu’à la médecine libérale. Le résultat ? vous le connaissez… on ne trouve plus de médecins en campagne ni en ville : ceux qui travaillaient « à l’ancienne » ont disparu ou sont près de la retraite, les autres sont débordés et souvent au bord du burn-out.

Il y a encore trois points dans le témoignage de Sylvain sur lesquels j’aimerais revenir :

« J’aimerais me passer de ces médicaments pourvoyeurs de maladie ».

Non, rassurez-vous, les médicaments peuvent avoir des effets secondaires mais ne sont pas des pourvoyeurs de maladie. Si une bonne relation, une vraie relation de confiance, s’établit entre soignants et soignés, tous ces effets secondaires sont contrôlables par des changements de posologie ou de molécules. Mais c’est encore une question de temps, d’écoute réciproque et de confiance mutuelle.

La deuxième remarque de Sylvain sur laquelle j’aimerais revenir concerne les médicaments pour le cœur.

« Y aurait-il un pendant naturel à ces molécules susceptibles de diminuer le risque cardiovasculaire ? »

Oui et non, je m’explique :

  • Le risque cardiovasculaire est lié à l’augmentation insidieuse de la tension artérielle[7]. Le XXème siècle fut celui de la découverte d’antihypertenseurs efficaces ne présentant que peu de risques s’ils sont correctement prescrits… et pris de manière adéquate par le patient. Il est difficile d’en faire l’’impasse ;
 
  • Ce risque est également lié à la fluidité du sang : un sang trop épais peut conduire à la formation de caillots (thromboses) à l’origine d’accidents vasculaires cérébraux. Pour fluidifier le sang, on prescrit des anticoagulants, alors que certains produits naturels (encore mal connus d’un grand nombre de confrères) permettent d’en diminuer la posologie ou même de les remplacer ;
 
  • La prescription d’un médicament susceptible de diminuer le taux de mauvais cholestérol est un autre problème : tout d’abord, la relation entre un taux élevé de cholestérol (hypercholestérolémie) et un risque vasculaire n’est que très relative. Le problème est le cholestérol oxydé[8], engendré par le « stress oxydatif »[9] : mauvaise alimentation, tabagisme, absence d’exercice physique quotidien (ne serait-ce que 30 minutes par jour de marche soutenue[10]), stress psychologique permanent et mal géré, etc. ;
 
  • Concernant les bêta-bloquants (médicaments permettant de ralentir le cœur), des substances naturelles qui renforcent le muscle cardiaque et régularisent son rythme existent : la principale d’entre elles est l’aubépine[11]. Elle peut être conseillée seule ou en association avec ces médicaments afin d’en réduire les doses et donc les potentiels effets secondaires.

La dernière remarque de Sylvain concerne la maladie dans sa vision globale.

« Je pense que le psycho et le physique sont liés »

Oui, tout le monde s’accorde sur ce point, mais les relations entre les deux sont complexes. Il existe de multiples sortes de psychothérapie, courtes ou longues, verbales ou gestuelles… N’oublions pas que l’exercice physique, le chant ou la danse sont aussi une forme d’auto-psychothérapie. L’important est de trouver la pratique qui vous convient. Il ne faut pas hésiter à en changer et surtout à se tourner, si besoin, vers des praticiens diplômés et reconnus.

Je pense, à propos des remarques de Sylvain, qu’il est parfaitement évident qu’une prise en charge globale de tous ses problèmes pourra, à terme, lui permettre de se passer d’un bon nombre de médicaments ou d’en réduire considérablement les doses, qu’il s’agisse :

  • D’une meilleure gestion du stress tout au long de sa vie ;
 
  • D’une meilleure hygiène de vie, dont une alimentation adéquate et orientée comme il se doit vers un régime de type méditerranéen[12] ;
 
  • D’une éventuelle supplémentation : oméga 3, antioxydants, vitamines C et D, zinc, ail, plantes anti-inflammatoires et/ou antithrombotiques…

Tout peut – et doit – être guidé et mesuré par des bilans nutritionnels ou des bilans de stress oxydatif[13] que malheureusement, pour les raisons que nous connaissons, beaucoup de médecins ne proposent pas. Ces bilans exigent des connaissances particulières et ils ont un coût qui, dans notre système actuel, ne peut être qu’à la charge du patient. J’ai détaillé l’ensemble de ces mesures dans un programme de vidéos-texte que vous pouvez acquérir par ce lien.

Pour conclure à propos de toutes les questions, commentaires et remarques que vous avez formulées et relier ainsi les deux parties de ce texte : Il n’y a pas à opposer plusieurs formes de médecine, médecine chinoise ou occidentale, médecine naturelle ou « chimique » : une substance naturelle peut être tout aussi dangereuse qu’une substance de synthèse, si elle est mal prescrite. Tout est question de compétence, d’individualisation du remède[14], de temps (et de rémunération du temps), de confiance, de transparence réciproque et d’acceptation.

Aucun traitement ne trouvera sa pleine efficacité si cette relation de confiance n’existe pas.

Il n’y a pas de médecine plus « placebo[15] » l’une que l’autre. Le placebo, dit-on, guérit au moins 30% des patients (si ce n’est plus), autant à l’hôpital que chez ceux que l’on traite un peu trop vite de « charlatans ». C’est une réalité statistique.

C’est le nocebo[16] qu’il faut combattre, parfois la parole de celui qui vous dit « il ne vous reste que quelques mois » !  D’autant plus que la réalité le fait souvent et heureusement mentir. Mais l’effet nocebo, c’est aussi le rejet irraisonné et inutilement négatif, par le patient, de la thérapeutique proposée.

Pour plâtrer toutes les fractures ouvertes non soignées : générationnelles, numériques, géographiques, culturelles (comme le dit très bien Slaheddine), donnons la parole au professeur Christian Perronne[17], l’un des mieux formé et informé d’entre nous. Je résumerais ainsi une interview qu’il a donnée récemment :

  • Gardons-nous de ceux qui suivent le mouvement sans se poser de question, sans réfléchir, parce que les opinions viennent d’en haut et des Sociétés dites « Savantes » ;
 
  • Gardons intact notre esprit critique. Ne nous laissons pas gouverner ni manipuler par les forces non rationnelles de notre cerveau et notamment, en son centre, par cette petite amygdale[18] qui nous déconnecte de tout raisonnement rationnel ;
 
  • Gardons notre optimisme car « tout est en train de se casser la gueule », il y a des scandales qui éclatent tous les jours, des scandales médicaux, des scandales financiers … et cela ne va pas durer très longtemps ;
 
  • Ne nous sentons pas seulement résistants mais plutôt éveillés ;
 
  • Nous avons vécu une période terrible (pandémie et contraintes liberticides) … il fallait peut-être vivre cette période terrible pour connaître un renouveau ;
 
  • Soyons dans l’espoir et l’attente sereine de ce renouveau.

Je vous souhaite à tous une merveilleuse année.

Surveillez bien votre boîte mail.

Docteur Dominique Rueff

 


[1] Vous pouvez retrouver ces commentaires au bas de cette lettre de décembre : https://www.lettre-docteur-rueff.fr/un-retour-a-soi-pour-cette-fin-dannee/

[2] J’en parle dans l’une de mes lettres : https://www.lettre-docteur-rueff.fr/mediter-pour-sa-sante-et-celle-des-autres/

[3] RadioFrance (02.10.2022). Christian Bobin : « Nous existons si peu, c’est un miracle que cette larme dans les yeux ». https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-grand-atelier/le-grand-atelier-du-dimanche-02-octobre-2022-9698443

[4] Je parle des peurs dans plusieurs de mes lettres : https://www.lettre-docteur-rueff.fr/comment-mieux-maitriser-vos-peurs/, https://www.lettre-docteur-rueff.fr/au-dela-de-vos-peurs/, https://www.lettre-docteur-rueff.fr/peurs-angoisses-anxiete-aidez-vous-des-plantes-adaptogenes/

[5] République Française (16.11.2022). Soins hospitaliers : T2A et autres modes de financement. https://www.vie-publique.fr/fiches/37927-financement-des-soins-lhopital-la-tarification-lactivite-t2a

[6] RadioFrance (26.01.2018). André Grimaldi : « On a transformé l’hôpital en clinique commerciale ». https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/andre-grimaldi-on-a-transforme-l-hopital-en-clinique-commerciale-2020566

[7] Fondation Recherche Médicale. Comprendre l’hypertension artérielle. https://www.frm.org/recherches-maladies-cardiovasculaires/hypertension-arterielle

[8] Adrien Pasteur-Rousseau (03.07.2019). Athérosclérose et physiopathologie : la métaphore du mur de briques. https://www.cardio-online.fr/Actualites/A-la-une/Atherosclerose-et-physiopathologie-la-metaphore-du-mur-de-briques

[9] Je l’explique dans une lettre : https://www.lettre-docteur-rueff.fr/stress-oxydant/

[10] À la limite de l’essoufflement

[11] Rachel Mulot (15.07.2016). L’aubépine, plante recommandée contre la tachycardie et le stress. Sciences et Avenir. https://www.sciencesetavenir.fr/sante/coeur-et-cardio/l-aubepine-plante-recommandee-contre-la-tachycardie-et-le-stress_31008

[12] Manger Bouger, Samté publique France. Qu’est-ce que le régime méditerranéen ? https://www.mangerbouger.fr/manger-mieux/se-faire-plaisir-en-mangeant-equilibre/s-informer-sur-les-differentes-pratiques-alimentaires/qu-est-ce-que-le-regime-mediterraneen

[13] Bilans particuliers qui mesurent les antioxydants comme le glutathion, la vitamine C, E, etc. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter mes lettres sur le sujet : https://www.lettre-docteur-rueff.fr/stress-oxydant/ et https://www.lettre-docteur-rueff.fr/les-fantastiques-pouvoirs-du-glutathion-et-son-action-sur-le-covid-19/

[14] Comme le disent par ailleurs les médecins homéopathes

[15] Haour F (2005). Mécanismes de l’effet placebo et du conditionnement : Données neurobiologiques chez l’homme et l’animal. Med Sci (Paris) 21(3), 315-319. https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2005/03/medsci2005213p315/medsci2005213p315.html

[16] Futura Science. Effet nocébo : qu’est-ce que c’est ? https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-effet-nocebo-12870/

[17] Youtube. Christian Perronne déballe tout pour le Nouvel An ! Le Courrier des Stratèges. https://www.youtube.com/watch?v=MQhB-uKbwyM&t=177s

[18] Une structure du cerveau qui régule nos actions face à la peur, j’en parle dans ma lettre sur les peurs : https://www.lettre-docteur-rueff.fr/au-dela-de-vos-peurs/

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